Dans la mythologie élyséenne, le président de la République serait un grand réformateur qui aurait le courage de prendre les décisions que personne d’autres n’oserait assumer. Mais cette présentation ne résiste pas à une analyse un peu détaillée de son bilan.
Un mauvais bilan
Celui qui a été l’emblématique ministre de l’intérieur des années 2000 devrait rougir de son bilan sur les questions de sécurité. En effet, depuis huit ans, les violences aux personnes n’ont cessé de progresser, malgré les innombrables lois votées et les déclarations du gouvernement. Le « président du pouvoir d’achat » évite désormais soigneusement de parler de ce sujet. Sur l’économie, les résultats du gouvernement sont désastreux.
Si le gouvernement a pu fanfaronner quelques trimestres où la croissance était plus forte que celle de la zone euro, ce n’est pas le cas depuis six mois. Près de cinq millions de Français sont privés d’emplois. Le financement de notre système de retraites n’est absolument pas assuré par la réforme actuelle (les comptes ne seraient qu’à l’équilibre en 2018, et encore, avec des hypothèses bien optimistes) et notre déficit budgétaire sera le plus fort de la zone euro l’an prochain.
Une main faible
Nicolas Sarkozy aimerait être vu comme un homme courageux capable de prendre des décisions difficiles. Dans la réalité, il parle beaucoup, quitte à froisser beaucoup de monde, mais cède très souvent (à part sur la réforme des retraites). Sur les régimes spéciaux, il a énormément cédé, comme sur le traité de Lisbonne, qui de « mini traité limité aux questions institutionnelles tenant compte du ‘non’ », s’est transformé en TCE bis alors qu’il était en position de force pour obtenir ce qu’il voulait.
L’épisode du remaniement le montre bien d’ailleurs. Alors que tous les présidents précédents avaient nommé un premier ministre inattendu (Pompidou et Couve de Murville pour le Général, Barre pour VGE, Fabius et Cresson pour Mitterrand, DDV pour Chirac), Nicolas Sarkozy cède finalement à l’opinion public et celle de sa majorité. Il a mis beaucoup trop de temps à sanctionner Rama Yade malgré ses innombrables dérapages. Le sens de la décision ne semble pas son fort.
Un gant de fer
Le pire est que cette incapacité à prendre des décisions fortes, qui se retrouve dans la superficialité de la plupart des réformes, tranche avec un style qui, au contraire, est aussi tranchant qu’il ne l’est pas sur le fond. Pour Nicolas Sarkozy, le clivage se fait plus sur la forme que sur le fond, d’où l’improbable et navrant débat sur l’identité nationale, dont on se demande toujours pourquoi il a eu lieu, quels en étaient les objectifs et ce qui a bien pu en sortir, à part beaucoup de polémiques souvent stériles.
Nouvel exemple avec le G20 de la semaine dernière. Etant donné que la France prend la présidence de cette institution, on aurait pu s’attendre à ce que le président de la République prenne le soin d’assurer une bonne succession avec la Corée. Las, il est arrivé le dernier à Séoul et est reparti le premier, contrairement à tous les usages diplomatiques. La présidence du G20 est pour lui davantage un nouvel hochet qui flatte son ego qu’un moyen de chercher à faire concrètement quelque chose.
Cette présidence arrive à cumuler un activisme de façade qui irrite les Français et nos partenaires étrangers du fait de la forme tout en étant incapable de concevoir des réformes de fond sur la plupart des sujets (éducation, emploi, délocalisations, pouvoir d’achat, sécurité…). Vivement 2012 !
Laurent Pinsolle